Espèces & habitats de l'estran
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Moulière
La moulière est le nom donné aux agrégats de moules retrouvés généralement sur les rochers battus par les vagues et plus rarement sur un substrat meuble (sable ou vase). Elle peut également se développer sur des épaves, comme en Côte d’Opale par exemple. La zone de l’estran où elle peut se développer correctement est bien spécifique. Les moules sont assez résistantes à l’émersion, mais grandissent beaucoup moins vite sur le haut de l’estran où elles restent trop longtemps hors de l’eau.
En constituant des récifs, les moules créent un abri pour de nombreuses autres espèces (crustacés, poissons, autres mollusques, etc.). Selon leur support, elles peuvent s’accumuler sur près de 30 cm d’épaisseur et se compter par centaines sur 1m². Elle s’accrochent entre elles ou au support à l’aide de leur byssus, ce filament collant extrêmement solide. Si les conditions environnementales ne leur conviennent plus, elles peuvent rompre ce lien et se laisser porter dans le courant pour retrouver une zone plus favorable à leur développement. Sur un milieu sableux ou vaseux par exemple, ce phénomène peut avoir lieu en cas de recouvrement par les sédiments ou l’accumulation trop importante de biodéposition (leurs propres rejets).
En recouvrant des surfaces importantes, la moulière est également une réserve de nourriture pour certains mollusques prédateurs (pourpres), poissons (daurades royales notamment), crabes et oiseaux. Cet habitat joue un rôle primordial dans la chaîne trophique.
De tout temps, les moulières sauvages ont été exploitées par l’homme, car généreuses et facilement accessibles. Mais déjà au Moyen-Age, on retrouve des écrits insistant sur l’importance de ne pas consommer trop de moules pour ne pas épuiser la ressource. Bien que l’élevage de moules soit apparu assez tôt (à partir du XIIIème siècle), nous avons continué à exploiter ces moulières sauvages des côtes normandes, bretonnes et atlantiques, à raison de plusieurs dizaines de tonnes par an parfois. Or depuis une quinzaine d’années, les populations sauvages à l’échelle française et européenne se dégradent très sérieusement. La pêche professionnelle des gisements sauvages du large du Cotentin a même été interrompue à partir de 2016, à cause du déclin des moulières… Aujourd’hui, ce sont donc les bretons, les normands, les danois et les suédois qui constatent les pertes de plus en plus importantes. Le phénomène semble s’accélérer. De fait, la filière professionnelle se fragilise et les sites ouverts aux pêcheurs de loisirs se font de plus en plus rares !
Déterminer la cause précise de ce déclin relève du casse tête. En fait, elles seraient multiples. De nombreux scientifiques accompagnant les filières professionnelles pointent du doigt les épisodes de contamination par les bactéries Vibrio splendidus et Francisella, peut-être plus fréquents et intenses qu’auparavant. A cela s’ajoutent des variations climatiques (réchauffement de l’eau et variations des propriétés chimiques), une dégradation de la qualité de l’eau issue des bassins versants, la prolifération de certains prédateurs comme les araignées de mer dans certains secteurs et la prédation habituelle ou renforcée par les oiseaux et autres poissons… Beaucoup de facteurs qui se combinent aujourd’hui pour expliquer ce déclin progressif. L’avenir des moulières est donc incertain sur les secteurs traditionnellement exploités, mais il faut garder en tête que cette espèce possède une capacité de recolonisation très importante si les conditions environnementales redeviennent favorables.
AVIS AUX PÊCHEURS À PIED
Pour ne pas dégrader les gisements de moules, déjà soumis à des menaces naturelles, il est impératif de laisser les jeunes moules accrochées à leur rocher et d’utiliser des outils non destructeurs… La main étant le meilleur outil pour ne récolter que les moules ayant atteint la taille minimale réglementaire.
Pour en savoir plus :
Téléchargez notre fiche « La moulière, et demain ? »
Moulière d’Ambleteuse dans le Pas-de-Calais – Antoine Meirland
Vidéo
Quelques bonnes pratiques de pêche à pied : la moule